Longtemps prioritaire et pratiquement seul critère lors du recrutement, le « diplôme » a depuis quelques décennies un solide concurrent, bien que parfois allié, dans le concept de « compétence ». L’expérience étant ainsi enfin valorisée, il devient d’autant plus difficile pour les recruteurs de faire le tri lors de la recherche du bon candidat, toutcomme pour les postulants d’explorer, identifier et mettre en valeur leurs atouts sur leurs documents. De plus, il n’y a pas que la sphère professionnelle qui est prise en compte, mais bien tous les éléments, même issus de la vie privée, qui peuvent aujourd’hui être déterminants.
La naissance de deux nouvelles notions marque cette tendance. Il s’agit du bilan de compétences dont les premiers centres ont vu le jour dans les années 80 et qui, par exemple en France, fait aujourd’hui l’objet de loi (depuis 1991, toute personne peut en solliciter un et décider de fournir les résultats ou non à son employeur), ainsi que de lavalidation des acquis qui s’est instaurée en Suisse il y a de cela quelques années seulement et qui vise à donner des diplômes aux personnes qui travaillent depuis assez longtemps dans un secteur, sans formation, sous la condition de quelques modules de remédiation décidées par un comité.
Le bilan de compétences
La vision de la vie professionnelle consistant à apprendre, puis appliquer les connaissances est enterrée. On ne cesse d’apprendre et dans toutes les dimensions de notre vie. Ainsi, l’exemple des compétences managériales et relationnelles est très illustratif. Dans l’impossibilité d’enseigner ces notions académiquement parlant, les activités extra-scolaires revêtent aujourd’hui une importance toute particulière pour les entreprises et leurs recruteurs. Effectivement, autant les capacités à travailler en équipe, résoudre les conflits ou garder son sang-froid dans les situations de stress deviennent de plus en plus importantes lors de la définition d’un poste à repourvoir, autant ce sont des capacités plus en lien avec la personnalité et l’expérience qu’avec la formation. Dès lors, des activités extra-professionnelles peuvent passer d’accessoires à protagonistes de la sélection finale et il est donc nécessaire de bien recenser tout ce qui nous définit en tant que professionnel, mais aussi en tant que personne. Le bilan de compétences se compose des étapes suivantes :
1. État des lieux
Le but de cette étape est de trouver un sens au parcours professionnel. Un fil conducteur qui permettra, le cas échéant, de mieux définir son « être professionnel ». Ainsi, tout les éléments devront être analysés en profondeur, depuis le parcours dit « normal », jusqu’aux éventuels diplômes, en passant par les difficultés, les échecs et les grandes réussites. C’est le « Qui suis-je ? »
2. Identification des compétences
Une compétence se traduit par la capacité à produire un résultat en combinant différents savoirs. Il s’agit du « Que sais-je ? » et se compose des points suivants :
les savoirs (connaissances théoriques par la formation ou l’expérience)
le savoir-faire (connaissances pratiques acquises sur le terrain)
le savoir-être (connaissances et capacité d’application des comportements à adopter dans un groupe de travail. Le soi, la personnalité professionnelle),
le savoir-devenir (capacité d’adaptation ou capacité à actualiser les autres savoirs et à les recombiner entre eux pour faire émerger de nouvelles aptitudes plus adaptées au nouvel environnement professionnel)
3. Réfléchir sur ses valeurs
Le soi professionnel n’est jamais très différent du soi global, étant donné qu’il en fait partie. Tous deux partagent les mêmes valeurs, idéaux et croyances. Il devient dès lors incontournable de les identifier, afin de pouvoir définir les critères nécessaires pour atteindre une pleine réalisation professionnelle bien sûr, mais aussi de soi. C’est le« En quoi crois-je ? »
4. Les feedbacks
C’est la phase où l’on se confronte au regard des autres. Après avoir fait le point sur toute notre histoire de vie, professionnelle et privé, ainsi que sur nos objectifs et nos valeurs, nous recherchons des informations en se confrontant au monde. Amis, parents, collègues, famille… il est important de savoir comment les autres nous perçoivent afin de comparer les réponses à notre propre vision et de l’enrichir. Les thématiques traitées pourraient être les suivantes, sans prétention d’être exhaustifs :
Comment nous voient-ils en tant que « professionnel » ?
Sont-ils conscients de nos compétences ?
Ont-ils quelque chose à nous apprendre sur nos limites ?
Comment nous voient-ils nous développer dans les années à venir ?
Ont-ils conscience de nos valeurs, objectifs, projets à court et long terme ?
Ont-ils des conseils à nous donner et d’éventuels critiques constructives à faire ?
Leurs réponses permettront de mieux comprendre ce que l’on dégage et ainsi, de pouvoir mieux préparer la recherche d’emploi. C’est le « Quelle est mon image ? ».
La validation des acquis
« C’est en forgeant que l’on devient forgeron ». Ce proverbe résume à lui tout seul la notion de validation des acquis. Le concept de « compétence » a valorisé l’idée quel’expérience permet d’acquérir des connaissances théoriques, pratiques et comportementales non reconnues par des diplômes, mais dont l’évaluation objective est nécessaire pour que l’individu puisse les mettre en valeur et l’économie les identifier. Aujourd’hui, des CFC sont ainsi délivrés avec la simple, mais riche expérience professionnelle comme seul bagage, sous certaines conditions de mise à niveau théorique (culture générale). C’est donc reconnaître qu’il y a trois façons de développer ses compétences :
en formation initiale, avant la vie active ;
par le biais de formations pour adultes, en cours de vie active ;
et par l’exercice d’une activité professionnelle, c’est- à-dire par la vie active.
Cette nouvelle vision des profils professionnels permet un pas en avant considérable en ce qui concerne certaines inégalités trop longtemps maintenues dans le monde du travail :
le lourd fardeau d’un parcours scolaire en demi-teinte
la difficulté des migrants à valider certaines de leurs expériences à l’étranger
la non reconnaissance de la nouvelle position d’une personne promue
Conclusion
La conception des ressources humaines en ce qui concerne le recrutement, la gestion, la promotion et l’organisation du personnel a changé et il est nécessaire d’évoluer avec elle. La palette des éléments utiles à mettre en avant dans le dossier de candidature s’est tellement élargie, qu’il est devenu un art que de trouver et sélectionner les bons éléments et les présenter de façon à que le recruteur ait, non seulement une vision objective et complète des compétences, mais aussi de manière rapide, claire et succincte.
Le Curriculum Vitae recensant simplement les différentes étapes de la vie académique et professionnelle n’est plus suffisant. Il est nécessaire aujourd’hui de le compléter par une explicitation des différentes responsabilités, tâches et rôles qui nous ont été confiés lors de nos diverses expériences professionnelles, des différents travaux et spécialisations durant notre formation et même de nos missions bénévoles, de nos activités sportives, artistiques ou privées. Le CV devra être accompagné d’une lettre définissant précisément notre objectif dans cette éventuelle nouvelle aventure professionnelle : les raisons qui nous ont poussés à postuler dans cette entreprise et pour ce poste en particulier, ainsi que les compétences que l’on pourra mettre à leur disposition pour atteindre nos objectifs devenus communs.
Faire le bilan de ses propres compétences, de manière classique (bilan de compétences), de manière raccourcie à l’aide de professionnels (conseillers en orientation ou consultants) ou seul, est donc devenu indispensable à toute recherche d’emploi et la traduction tangible des fruits de cette réflexion sur les documents de postulation est déterminant dans l’aboutissement de notre projet professionnel car :
« Les enseignements tirés de l’action, de la prise de responsabilité réelle et de la confrontation avec des problèmes concrets apportent vraisemblablement des compétences que le meilleur enseignement ne sera jamais susceptible de fournir. »
(Un concept central aujourd’hui : les compétences dans le monde du travail, p. 10)
Références :
http://www.cedefop.europa.eu/etv/Upload/Information_resources/Bookshop/468/40_fr_mulder.pdf
http://emploi.travailler-en-suisse.ch/03/2009/bilan-de-competence-fonctionnement.html
http://www.senat.fr/rap/l01-356/l01-35617.html
http://www.numilog.com/package/extraits_pdf/e262769.pdf
Consultés le 24 septembre 2012